Je ne sais plus vraiment comment cette leçon de vie a fait irruption dans notre conversation apéro-dinatoire jeudi soir dernier, mais j’avoue qu’elle est bien tombé :
Un porteur d’eau partait tous les matins depuis son village pour se rendre à la rivière, distante de plusieurs kilomètres. En travers de ses épaules, une longue barre de bois équilibrait deux jarres en terre cuite, suspendues à chaque bout.
Une fois à la rivière, le porteur d’eau remplissait les deux jarres à ras bord et repartait vers le village. Le chemin du retour était toujours long et fatiguant, non seulement à cause du poids des jarres, mais surtout parce que l’une des deux était un peu fêlée, laissant suinter un peu d’eau au fil du chemin. Chaque matin, une fois au village, le porteur d’eau constatait que la jarre placée à sa gauche était à moitié vide.
Un jour, sur le chemin du retour, la jarre fêlée s’adressa au porteur d’eau et lui dit : « tu sais, je culpabilise de perdre ainsi mon eau pendant que toi tu t’épuises sur le chemin. J’en suis sincèrement désolé ! ». Le porteur d’eau s’arrêta, regarda la jarre et lui dit : « j’ai toujours su que tu étais fêlée et que tu perdais de l’eau alors que le village en a tant besoin. Cependant, regarde donc le bas-côté du chemin que nous parcourons tous les jours : as-tu remarqué les fleurs magnifiques qui y poussent de ton côté ? Sans toi, elles n’auraient jamais poussé et égayé le chemin du retour pourtant pénible. »
Cette histoire nous rappelle que chacun est unique et que nous avons tous nos failles, nos fêlures. Doit-on pour autant se juger en culpabilisant de ne pas être parfait(e) ? Doit-on vraiment être à la hauteur de tout, de tous et tout le temps ? Mes failles sont-elles un mal un pour moi et pour mes proches ? Qui suis-je pour en juger ? Qui es-tu pour le faire ?
Réciproquement, nous passons notre temps à reprocher telle ou telle chose à nos amis/collègues, mais au fond, leurs soi-disant défauts sont-il réellement néfastes ?
Accepter de se sentir fêlé dans le respect de soi et d’autrui et voir ce qu’il y a de bon en chacun de nous.
Alors merci S. de nous avoir fait part de cette leçon de vie que je ne connaissais pas, et qui tombe à point nommé en ces temps d’incertitude. Chaque période d’inactivité est propice à des « masturbations de cerveau » (comme j’aime les appeler) ; chaque petite entrave à quelque chose de bien « rodé » engendre une invasion de questions qui foutent le doute et des remises en questions là où il n’y en avait pas (ou alors elles y sont mais surpassées, éteintes par le rappel des éléments/évènements positifs). Peut-être que certaines choses sont réellement bien présentes mais que je ne veux pas les entendre ou les accepter pour le moment et qu’elle ressurgiront peut-être plus tard.
Je ne souhaite pas passer pour une moralisatrice ou avoir l'air de me trouver des excuses, mais des fois se mettre des coups de pied au cul et se remémorer cela ne fait pas de mal.
Une phrase revenait souvent dans mon ancien taf : « à chaque jour suffit sa peine ». Il suffit de se la dire plus souvent et de prendre les choses comme elles arrivent jour après jour. Et si on n’y arrive pas parce que nos vieux démons prennent le dessus de temps en temps, l’accepter, car au final, nous ne sommes qu’humain après tout.